Lundi dernier j'apprenais de façon plutôt brutale ton décès, tu t'appelais Gizmo et tu n'avais que douze ans. Tu étais un chat particulier, je t'ai recueilli tu étais bébé, mais au départ tu n'étais pas à moi. Ton ancien maître était un gros con je le crains, et j'ai pu le constater en vivant avec tes traumatismes.
Un jour, tu n'avais pas un an, ton maître que je connaissais m'a téléphonée en me disant : "soit tu le récupères soit je le fous dehors". Je lui ai dit que s'il te foutait dehors tu mourrais puisque tu étais bien trop petit pour survivre, il m'a répondu que ce n'était pas son problème. Ayant déjà deux chats et un chien à l'époque, j'ai fait le choix de te prendre auprès de moi. Je suis venue te chercher, tu étais dans le noir, enfermé dans la salle bain dans la baignoire, trempé et tu tremblais, ça m'a crevée le coeur. Je t'ai enveloppé dans une serviette, je t'ai pris dans mes bras et je t'ai emmené. Tu es resté calme sur mes genoux tandis que je te conduisais vers ta nouvelle maison. Chez moi, tu étais libre, tu allais et venais à ta guise, tu t'es plutôt vite acclimaté à cette liberté mais tu étais un chat stressé, toujours sur le qui vive, toujours sur la défensive, toujours prêt à fuir. Jamais tranquille. De temps en temps tu me faisais le privilège de venir chercher un câlin, je t'ai toujours laissé venir d'ailleurs, je ne suis pas de nature à forcer. Voilà, les années sont passées et tu semblais aimer cette liberté, tu étais plutôt solitaire.
Depuis quelques années, malgré ta tranquillité, tes traumatismes étaient de plus en plus présent. Tu me faisais les pires saloperies à la maison, tu pissais sur les meubles, tu faisais tes besoins dans la douche et j'en passe... Mais toujours ma chatière restait ouverte pour toi, il y avait toujours une gamelle de nourriture pour toi même si ta présence était plutôt grandement marquée par ton absence. De rare fois tu me faisais l'honneur d'un câlin. Tu avais des habitudes bizarres, tu aimais te cacher sous la douche, ou t'engouffrer dans des couvertures enroulées... Sur les derniers temps, c'était devenu franchement compliqué. Je ne pouvais plus t'emmener chez le vétérinaire parce qu'il était tout simplement impossible de te mettre dans la cage de transport, la dernière fois tu m'as abimée la main. Te forcer était un énorme traumatisme pour toi.
Lundi soir d'il y a deux semaines, tu es venu manger. Je t'ai laissé tranquille ensuite tu es venu vers moi, je t'ai enveloppé dans mes bras, je t'ai fait un câlin tu ronronnais... Et puis il fallait que je te nettoie les oreilles, ce que j'ai fait. Bien sûr, ça a été rocambolesque, quand c'était terminé, je t'ai carressé sur la tête comme tu aimais tant que je le fasse pour te rassurer, mais toi tu es parti d'un coup brusquement, tu as passé la chatière avec brutalité... Le lendemain, je ne t'ai pas vu perché dans ma glycine (ta nouvelle lubie ou folie, depuis quand un chat dort et passe ses journées dans une glycine..., toi). Le mercredi j'ai dit à mon voisin que je ne t'avais pas vu et que je trouvais bizarre que tu ne viennes pas manger. Quand dans le week-end, j'ai reçu un courrier de l'Icard qui me disait que tu avais été trouvé par quelqu'un qui t'avait emmené chez un vétérinaire. Je n'ai pu téléphoner que le lundi, pour espérer venir te chercher, c'est là que j'ai appris que tu étais décédé. Que l'on t'avait emmené dans la nuit de lundi à mardi chez le vétérinaire, que l'on t'avait trouvé gisant sur le bord de la route et que tu avais été percuté au niveau de la tête par une voiture. En réalité, le vétérinaire n'a pas pu te sauver tant la tête était endommagée.
Alors je m'en veux. Je ne peux arrêter de me dire que c'est de ma faute. Que si je ne t'avais pas brusqué en te nettoyant les oreilles, sans doute serais-tu encore perché dans ma glycine. Ton absence est très présente au final, même si tu étais déjà très absent en réalité. Douze ans c'est jeune, quand je pense que mes autres chats ont seize ans et quatorze ans. Ta disparition est violente. Personnellement, j'étais rassurée tout le week-end en pensant que tu étais en sécurité chez un vétérinaire, quelle n'a pas été ma déconvenue une fois ton décès annoncé. Tu étais un chat spécial, mais tu étais mignon et je t'aimais même si tu étais difficile. J'aime les âmes cassées parce que je suis une âme cassée mais je n'ai en fin de compte jamais réussi à te rendre heureux je crois... Tout juste je t'ai apporté une liberté de vie, chez moi tu allais et venais à ta guise, ma chatière était toujours ouverte mais aujourd'hui, je n'entendrai plus le bruit si particulier qui était le tien lorsque tu rentrais pour me faire l'honeur de ta présence... Adieu Gizmo, je t'aimais.
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